Santé des adolescents : De grands vides juridiques qui interpellent
L’un des vides soulignés dans le rapport d’évaluation des obstacles juridiques au droit à la santé des adolescents et jeunes au Cameroun, est l’absence d’une définition juridique des notions de jeune etadolescent. Les notions de jeune et d’adolescent ne sont pas réceptionnées en droit positif. Une revue de la législation et de la réglementation fait en effet ressortir trois (03) notions, à savoir : le mineur, personne âgée de moins de vingt-et-un (21) ans (article 388 du Code civil), le majeur, personne âgée d’au-moins vingt-et-un (21) ans (article 488 du Code civil) et l’enfant, personne âgée de moins de dix-huit (18) ans (article 3 de la loi n° 2023/009 du 25 juillet 2023 portant Charte de protection des enfants en ligne au Cameroun ; article 3 de la loi n° 2024/016 du 23 décembre 2024 portant organisation du système d’enregistrement des faits d’état civil au Cameroun). Bien plus, il n’existe pas une position commune sur ces notions entre les différentes agences des Nations Unies. A cet effet, la notion de jeune est différemment perçue. L’OMS (20-24 ans) ; l’ONUSIDA (15-24 ans), l’UNICEF (20-24 ans). En outre, le discours politique au Cameroun et la stratégie nationale de la jeunesse positionnent la jeunesse dans la tranche d’âge 15-35 ans. L’on évoque également l’absence de fondement juridique de la « majorité sanitaire » appliquée par certains services de santé sexuelle et reproductive. Suivant le rapport, il a été donné de constater que la plupart des formations sanitaires ont pour barème le seuil de dix-huit (18) ans pour offrir à un adolescent un service de santé sexuelle et reproductive sans autorisation parentale. Ces dernières se fondent sur les Directives du Comité National de Lutte contre le SIDA pour appliquer cette « majorité sanitaire ». Or, la revue de la législation et de la réglementation en vigueur au Cameroun ne consacre pas cette majorité. En effet, il n’existe au Cameroun que trois (03) majorités, à savoir : la majorité pénale, fixée à 18 ans : article 80 de la loi n° 2016/007 du 12 juillet 2016 portant Code pénal, modifiée et complétée par la loi n° 2019/020 du 24 décembre 2019 ; la majorité électorale, fixée à 20 ans : article 45 de la loi n° 2012/001 du 19 avril 2012 portant Code électoral, modifiée et complétée par la loi n° 2012/017 du 21 décembre 2012 et par la loi n° 2019/005 du 25 avril 2019 et la majorité civile, fixée à 21 ans : article 488 du Code civil et article 4 de la loi n° 1968/LF/3 du 11 juin 1968 portant Code de la nationalité camerounaise. Cette situation expose les Agents de Santé Communautaire qui proposeraient des services de SSR à des jeunes de moins de vingt-et-un (21) ans à des poursuites judiciaires de leurs parents, sur le fondement de certaines dispositions du Code pénal. Il s’agit notamment de l’article 344 dudit Code qui parle de la corruption de la jeunesse : « est puni d’un emprisonnement d’un (01) à cinq (05) ans et d’une amende de vingt mille (20.000) à un million (1.000.000) de francs, celui qui excite, favorise ou facilite la débauche ou la corruption d’une personne mineure de vingt-et-un (21) ans. L’article 347 quant à lui renvoie à l’outrage à la pudeur sur une personne mineure de seize à vingt-et-un an avec une peine d’emprisonnement pouvant aller de douze (12) mois à dix (10) ans. Parlant de la barrière du secret professionnel sur le statut sérologique , le principal problème posé est le suivant : le personnel médical ayant connaissance du statut sérologique d’un patient est tenu de ne pas divulguer les informations sur l’état de santé de ce dernier, au risque de s’exposer aux sanctions prévues par le décret n° 83/166 du 12 avril 1983 portant Code de déontologie des médecins et l’article 310 du Code pénal : emprisonnement de trois (03) mois à trois (03) ans et amende de vingt mille (20.000) à cent mille (100.000) francs CFA. Certes en règle générale, les médecins font appel aux Assistants psychosociaux pour accompagner le patient séropositif à dévoiler son état de santé à son partenaire. Cependant, il peut arriver, dans certains cas, que le partenaire infecté s’obstine à ne pas informer l’autre de son statut sérologique. Dès lors, ce silence (du patient, tout comme celui du médecin), auquel s’ajoute le fait que le partenaire infecté ne suive pas régulièrement son traitement, met en danger la vie du partenaire sain. Ce dernier en vient souvent à être infecté et, ne se doutant aucunement de la nature de sa maladie, ne suit pas le traitement approprié, toute chose qui l’expose à la mort. Il en est de même des parents qui ont transmis le VIH/SIDA à leurs enfants, et se refusent de le leur avouer. Il conviendrait de modifier la législation et la réglementation en vigueur, en autorisant, à titre exceptionnel, le médecin à dévoiler le statut sérologique de son patient infecté, sous la quadruple condition suivante : le patient infecté ne suit pas régulièrement son traitement ; la charge virale du partenaire infecté est encore détectable et donc transmissible ; le partenaire infecté poursuit des rapports sexuels avec le partenaire sain ; le partenaire infecté refuse de dévoiler son statut sérologique au partenaire sain. Absence de texte national internalisant les clauses du protocole de maputo Le Protocole à la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples relatif aux droits de la femme en Afrique, en son article 14, paragraphe 2.c, prévoit le droit à « l’avortement médicalisé en cas d’agression sexuelle, de viol, d’inceste et lorsque la grossesse met en danger la santé mentale et physique de la mère ou la vie de la mère ou du fœtus ». Toutefois, depuis la ratification dudit Protocole par l’Etat du Cameroun en date du 13 septembre 2012, aucun texte juridique national n’a réceptionné les clauses de ce Protocole, notamment afin de préciser concrètement la procédure administrative, judiciaire ou juridictionnelle permettant de mettre en œuvre cet article. Bien plus, le Code pénal