Élimination de la violence basée sur le genre: les médias africains affûtent leurs armes

A l’initiative du REMAPSEN (Réseau des Médias Africains pour la Promotion e la Santé et de l’Environnement), avec l’appui de ses partenaires ONUFEMMES et les FONDS FRANÇAIS MUSKOKA, 65 journalistes d’Afrique de l’Ouest, du Centre et de Madagascar, sont en conclave à Dakar au Sénégal. Le forum régional qui se tient à cet effet est consacré à un enjeu crucial, l’élimination des violences faites aux femmes et aux filles, en mettant au cœur le respect des droits humains et l’autonomisation des femmes.
Les travaux ouverts le 04 décembre 2024 par Oumar Samb, Conseiller Technique au Ministère sénégalais de la Famille et des Solidarités, sont organisés dans le cadre de la campagne 2024 de 16 jours d’activisme contre la violence à l’égard des femmes. Il s’agit d’une campagne annuelle internationale qui démarre le 25 novembre de chaque année, date qui coïncide avec la journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes et qui se termine le 10 décembre qui marque la journée des droits humains. L’intérêt est de souligner l’importance de la thématique de la violence à l’égard des femmes et de montrer que cette violence est une violation des droits humains, malheureusement la violation la plus répandue dans le monde, selon Arlette Mvondo, Représentante Résidente de l’ONUFemmes au Sénégal. Elle s’exprimait au nom du Directeur régional de l’ONUFemmes pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre, le Dr Maxime Houinato, Directeur régional par intérim du bureau d’ONUFemmes. Elle précise également que ces 16 jours d’activisme s’inscrivent en droite ligne de l’initiative « Tous Unis d’ici 2030 pour mettre fin à la violence à l’égard des femmes » et l’ensemble du système des Nations Unis a collaboré dans la lutte contre la violence à l’égard des femmes et des filles.
» Le thème de l’édition 2024, 30 années après la déclaration de Beijing, Tous Unis pour mettre fin à la violence à l’égard des femmes et des filles, nous permet de marquer un temps d’arrêt pour examiner les progrès réalisés depuis 30 ans mais aussi constater, identifier les défis qui persistent« , a-t-elle ajouté pour mieux faire comprendre l’enjeu de ce forum et l’ampleur des problèmes au centre des échanges.
Efforts encore insuffisants pour endiguer un mal mortel
D’après les premiers rapports du processus de Beijing plus 30, les données des cinq dernières années dans la Région Afrique de l’Ouest et du Centre renseignent que 79% des États membres ont présenté des rapports qui ont permis de mettre en place des plans d’actions nationaux pour mettre fin à la violence contre les femmes et les filles, 90% des États ont introduit ou renforcé la législation en matière de lutte contre les violences à l’égard des femmes et des filles, 88% ont introduit ou renforcé des services pour prendre en charge les victimes de violences. Ces progrès pour l’instant ne sont encore que les arbres qui cachent la forêt car, le mal demeure profond et dévastateur. L’on est encore loin des objectifs fixés à Beijing, loin des objectifs de développement durable, loin des normes des droits de l’homme qui devraient garantir la protection et la sécurité de chaque femme et de chaque fille. Le rapport d’ONUFemmes sur les féminicides publié récemment révèle que toutes les dix minutes une femme est tuée par un partenaire intime ou un membre de sa famille. Cette Agence Onusienne spécialisée précise également qu’une femme sur trois subie des violences basées sur le genre en Afrique de l’Ouest et du Centre. Les mutilations génitales féminines, les mariages précoces, les violences sexuelles et domestiques continuent de priver des millions de femmes et des filles de leurs droits fondamentaux tout en limitant leur potentiel individuel et leur contribution collective à leurs sociétés. Aucun pays n’est épargné et aucun pays n’a réussi à éliminer ce fléau de la violence contre les femmes et les filles. Selon les experts, Cette réalité est exacerbée par des normes patriarcales enracinées, par des conflits armés et par les nouvelles formes de violences qui sont facilitées par la technologie numérique.
média-thérapie pour soulager, donner espoir et sauver des vies
Au regard de ce défi persistant, le Conseiller Technique au Ministère sénégalais de la Famille et des Solidarités appelle à une prise conscience et à la mobilisation de tous y compris les médias, vu que la promotion de l’autonomisation financière des femmes, pour ainsi dire l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, les filles et les garçons, ne constitue pas seulement une question de justice sociale, mais aussi un levier essentiel pour l’Afrique pour participer à la marche mondiale vers l’atteinte des objectifs de développement durable. Il invite par conséquent les professionnels des medias à ne pas rester silencieux. Il est attendu de ces derniers qu’ils dénoncent les inégalités de genre, sensibilisent les communautés et amplifient les efforts de prévention et de réponse. Oumar Samb les exhorte aussi à devenir des alliés actifs de ce combat, car l’accès à l’éducation, à un emploi décent, à la santé, à la justice, au financement, entre autres, demeure des droits universels pour tout être humain.
C’est le même appel que lance l’ONUFemmes à l’endroit des médias qui doivent s’associer à l’action qui doit être immédiate, collective, déterminée et transformatrice pour combler les lacunes très réelles qui subsistent dans le domaine de l’autonomisation, du leadership des femmes, de la législation, des services et des systèmes qui garantissent justice, responsabilité et la fin de l’impunité.
Le forum régional de Dakar constitue ainsi une opportunité unique pour renforcer les capacités à couvrir des thématiques complexes, mais surtout à élaborer des stratégies de communication qui placent la lutte contre les violences faites aux femmes et aux filles, le respect des droits des femmes et des filles et leur autonomisation au cœur de l’agenda médiatique. » Chers partenaires, chers médias, nous souhaitons au sortir de ces trois jours d’échange et de partage d’expérience atteindre des objectifs ambitieux mais atteignables que sont renforcer les capacités pour que vous deveniez des agents de changement de normes sociales, des champions de la défense des droits des femmes et de la lutte contre les violences faites aux femmes et aux filles dans vos pays respectifs, produire et diffuser au moins 350 contenus médiatiques qui amplifient les voix des survivantes, dénoncent des injustices et plaident pour des solutions durables pour l’élimination de toute forme de violence à l’égard des filles et des femmes et enfin élaborer une charte et un plan d’action régional engageant les médias à jouer un rôle actif et durable dans la promotion des droits fondamentaux des femmes et des filles« , a déclaré Arlette Mvondo.
Pour atteindre ces résultats, Youssouf Bamba, Président du REMAPSEN recommande aux participants plus d’écoute, de discipline, d’assiduité, de concentration pendant les travaux et de productivité après les travaux afin de faire reculer les frontières des inégalités et des violences faites aux femmes en Afrique. Pour le président Youssouf Bamba, ce forum constitue, le point de départ d’un engagement collectif des médias en Afrique avec en toile de fond, un renforcement des productions médiatiques de sensibilisation et de plaidoyer en vue de toucher toutes les cibles notamment les plus reculées pour un monde sans violence envers les femmes.
Les travaux prennent fin le 6 Décembre avec à la clé, une feuille de route clairement établie à l’issue des panels de discussions et les travaux de groupe animés par les experts de l’ONUFemmes, les activistes et autres parties prenantes aux travaux.
Prince Mpondo